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Par Hervé
NATHAN
lundi 02
septembre 2002
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«Les Décisions absurdes», Christian Morel,
Gallimard, 320 pages, 21 €.
out le monde a encore en tête les images
épouvantables de l'explosion de la navette Challenger,
le 28 janvier 1986, au-dessus de Cap Kennedy, à cause des
joints «défectueux» des boosters. On se souvient moins que
l'accident aurait pu être évité. Il était prévisible, et
certains ingénieurs l'avaient même annoncé ! Des responsables
s'étaient affrontés pour savoir s'il fallait ou non prendre un
risque, et la décision de lancement avait finalement été
prise, au mépris de l'opinion des responsables scientifiques,
et dans une atmosphère d'empoignades, au cours du compte à
rebours. C'est l'exemple d'une «décision absurde», sur lequel
se penche avec brio Christian Morel, qui est par ailleurs un
des grands responsables RH de Renault.
L'histoire de Challenger est accompagnée de onze
autres cas, certains aussi dramatiques, comme celui d'un
commandant de bord qui éteint en plein vol le seul réacteur de
l'appareil en état de marche ! Ou bénin, mais fort répandu,
l'usage obstiné de transparents illisibles dans les
conférences et réunions. Le problème, explique l'auteur, c'est
que ces décisions ne sont pas dénuées de rationalité, et
interrogent évidemment les organisations : «La dimension
profonde et durable de l'erreur est surtout alimentée par le
système collectif», soutient Christian Morel. Mais c'est
surtout dans «la perte de sens» qu'il faut chercher
l'explication profonde à l'irruption de l'absurde. On lira,
par ailleurs, avec bonheur un chapitre sur le dilemme de la
réunion de travail : soit elle est trop bien organisée, et
elle décourage l'initiative, soit trop peu, et elle semble ne
donner aucun résultat... |
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